Frantz Fanon - Une vie en révolutions - par Shatz Adam

La vie de Frantz Fanon se lit comme un véritable thriller de la décolonisation et de la guerre froide. Côtoyant avec ferveur les grands courants philosophiques et idéologiques de son temps, elle est aussi le drame poignant d'une expérience de pensée radicale. Adam Shatz raconte avec brio l'épopée de ce penseur et militant voué à demeurer, selon ses propres termes, « toujours un homme qui interroge ».

Parti combattre le fascisme en 1943 dans les rangs des Forces françaises libres, ce jeune Martiniquais charismatique et talentueux découvre en France et en Afrique du Nord la brutalité perverse du système colonial. Après ses études de médecine à Lyon, pendant lesquelles il se passionne pour l'existentialisme et publie son premier grand classique, Peau noire, masques blancs, Fanon approfondit son expérience clinique au centre hospitalier de Saint-Alban en Lozère, berceau d'innovations thérapeutiques qui marqueront profondément sa recherche d'une psychiatrie désaliénée au service des humiliés.

Cette quête de la désaliénation, il la met à l'épreuve de la situation coloniale lorsqu'il est muté à Blida en Algérie, à la veille de la guerre de libération. Il s'engage alors corps et âme dans le combat anticolonial, d'abord à Tunis où il met ses compétences médicales au service du Front de libération nationale (FLN), dont il devint l'un des porte-parole, puis en tant qu'ambassadeur itinérant du mouvement en Afrique subsaharienne.

Avec L'An V de la révolution algérienne puis Les Damnés de la terre, sa production intellectuelle ne faiblit pas malgré ses nombreuses missions en Europe et en Afrique. Fauché par une leucémie foudroyante, il meurt le 6 décembre 1961, à l'âge de 36 ans, laissant derrière lui une œuvre dont les accents prophétiques aussi bien que les nuances insoupçonnées ne cessent de surprendre.